On reprendra ici le thème de la « monocratie », cher à Robert Badinter – le pouvoir, pourtant issu du vote démocratique, se fait ensuite confisquer par un seul homme, comme nous le prouve chaque jour l’actuel locataire de l’Elysée. Toutes choses égales, Nogent vit un mal comparable, celui de la monocratie locale.
Les décisions sont prises en solo par le maire, le conseil municipal étant transformé en simple chambre d’enregistrement. Le climat des séances est révélateur : c’est le lieu du monologue, où le maire a l’exclusivité de la parole, avec la morne approbation de sa majorité. Seules interruptions, les saines interventions de l’opposition, qui fait là son travail. Puis les votes s’enchaînent, mécaniques … Dans les bons jours, toute divergence d’opinion devient une offense personnelle au maire. Certes la loi donne beaucoup de pouvoirs au premier élu de la commune, mais l’art de ce dernier est de les exercer avec tempérance. Se retenir de tout décider, de tout contrôler soi-même. Un vœu pieux à Nogent.
Condamné à l’inéligibilité par le tribunal administratif, Jacques J.P. Martin gagnera-t-il son appel ? S’il le perd, aura-t-il la tentation de revenir aux affaires, une fois sa peine purgée ? Seul l’avenir nous le dira. Mais cette situation nouvelle offre peut-être une chance aux Nogentais. Dans les mois à venir, qui sait, le maire (ou son successeur) sera enclin à jouer plus collectif, à partager ses prérogatives, à ne pas régenter toute notre vie citoyenne – bref, à rompre avec la pratique étouffante du pouvoir solitaire.
Ainsi circulerait mieux l’air frais de la démocratie locale. Il n’est jamais interdit de rêver.
Michel MASTROJANNI
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